A ne pas manquer : La guerre germano-soviétique, Nicolas Bernard.

La-guerre-germano-soviétique-Nicolas-BernardIl est des ouvrages qui font date et que l’on n’attend pas, qui plus est rédigés par des auteurs que l’on n’attend pas non plus. Non que Nicolas Bernard (aucun lien de parenté même si nous nous croisons virtuellement ça et là depuis des années) surprenne par une qualité et une finesse d’analyse que les lecteurs assidus de certains magazines ou familiers de certains forums d’histoire lui connaissent depuis longtemps, mais parce que c’est son premier ouvrage, qu’il est particulièrement ambitieux – y compris à son corps défendant – et que son auteur, avocat passionné d’histoire selon la formule consacrée, n’est pas ce que l’on nomme traditionnellement un « historien professionnel » dûment tamponné par l’université.

Raison de plus pour rester songeur qu’un pan aussi important de l’histoire de la Seconde guerre mondiale qu’est la guerre germano-soviétique – attention je n’ai pas dit le « front de l’Est », moins encore les opérations du front de l’Est, j’ai bien dit La guerre germano-soviétique en tant que phénomène historique global et essentiel de l’histoire du XXe siècle – n’ait jamais fait l’objet d’une véritable synthèse, tout au moins en français, jusqu’ici. Quoi qu’il en soit, voilà une lacune comblée et de fort belle manière. Bien sûr, les lecteurs cherchant une description détaillée des opérations devront se reporter à d’autres ouvrages, abondants et souvent de grande qualité (non, pas Paul Carell), plus ou moins récemment parus à ce sujet. Ici, non seulement l’érudition mais la méthode affleurent à chaque page et tout y passe, de façon fluide et parfaitement équilibrée : les relations entre les deux pays et leurs dictateurs, la nature particulière des régimes et de cette guerre « totale », la question des crimes et de la politique génocidaire nazie mise en perspective, et non en balance, avec les brutalités du camp soviétique, les questions économiques, l’arrière, la production de guerre, les enjeux politiques et diplomatiques, le terrain, les soldats, les opérations militaires elles-mêmes bien sûr etc etc… Le tout est assorti d’une bibliographie impressionnante, solide, plurielle et très touffue (presque trop même par rapport à l’ensemble s’il fallait trouver une remarque, on voit que le fameux Bibliobus de l’auteur n’a pas chômé ces dernières années) et d’un appareil de notes qui ne l’est pas moins.

Bref, on pourra toujours discuter tel ou tel point, appréciation, interprétation de l’auteur, mais le tour d’horizon est complet, clair, équilibré, savamment et abondamment sourcé et particulièrement pertinent. Un ouvrage destiné à devenir rien moins qu’une référence de l’historiographie de la Seconde guerre mondiale, et comme le souligne Stéphane Mantoux dans sa longue recension détaillée, un véritable outil de travail, tout simplement.

Nicolas Bernard, la Guerre germano-soviétique, chez Tallandier, septembre 2013, 800 pages.

A propos Cliophage

Historien et Journaliste; Spécialiste d'histoire militaire contemporaine (XIXe - XXe siècle), défense & plus si affinités
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9 commentaires pour A ne pas manquer : La guerre germano-soviétique, Nicolas Bernard.

  1. Bir-Hacheim dit :

    J’ai bien aimé la formule «  »historien professionnel » dûment tamponné par l’université. »
    😉

  2. Cliophage dit :

    Juste un petit clin d’œil à un débat régulier que j’entretiens avec Stéphane de l’Historicoblog3 🙂

    • Bir-Hacheim dit :

      On a bien pensé au même ! Je n’ai pas pu m’empêcher d’imaginer son jeune visage tamponné du sceau de son univ… 😀

      • Cliophage dit :

        A noter quand même (on pourrait se méprendre de l’extérieur) qu’il s’agit d’un petit clin d’œil purement amical pour un débat à fleurets mouchetés, pas d’une croisade hein 😉

      • Bir-Hacheim dit :

        De toute façon, il ne veut pas se dire « historien », complexe de « tamponné ». 😉

      • Bir-Hacheim dit :

        De toute façon, le jour de la Saint-Barthélémy des historiens, on le cachera ! 😀

  3. Bir :

    1) pas complexé pour un sou, merci.
    2) Tu penses vraiment à une Saint-Barthélémy des historiens ? Ou c’est juste pour rire ?

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